Les cyprès écailleux de Madrid qui oscillent lentement
Dans les marges de la symétrie émaciée par le vent
Sous les faibles caresses de ses doigts désossés et si lestes
Qu’ils arriveront plus tard à en sortir la poussière céleste
Les palmipèdes de pieds dans l’océan du sable illusoire
Qui ballent qui valsent et qui semblent parler en sous-main
Dans une énorme salle où le soleil pendouille au midi
Pénétrant les recoins les plus sombres d’une âme alourdie
La bohème qui s’encastre dans les balcons des plus beaux quartiers
Les boutiques les cafés les vitrines le bruit de papier
Qui tremblote dans les mains d’un vieil homme assis sur le banc
Dont la figure se plie au dossier et s’oppose au vent
La mélodie que sifflent les lèvres losangiques du métro
En émettant des jets de l’air chaud entre ses dents en carreaux
Je dirige mes pas vers l’azur qui mitraille le vert
Pour rejoindre le détroit du sable où m’emmène la rivière
Des pensées langoureuses des souvenirs flous des idées imprécises
Qui surgirent avec force du fond de ce tiède lacis
De ruelles dont les noms sont écrits sur les carreaux diaprés
Et qui m’enveloppèrent comme elles enveloppent un touriste égaré
Qui a eu l’impudence de divaguer des sentiers battus
En de s’enfonçer dans le quartier lové comme un fœtus
Fruit de l’histoire d’amour entre la ville et un rêveur lointain
Qui, sans le savoir, y assiste à sa propre naissance
Je m’approche à la clôture du parc je suinte à travers
Comme la lumière comme l’air comme les mots comme les sons comme les vers
Comme la mer comme les rimes comme les larmes comme les ondes comme le vent
Comme les feuilles comme les rires comme les flashs comme les notes de parfum
Je termine ma balade et je regarde encore un moment
Les couronnes des cyprès qui oscillent et Madrid qui me tient par la main