L’univers, mon chéri, j’ai une chose à vous dire
Je vous aime, je vous aime, même si ça vous fait rire
Même si ça vous fait perdre vos étoiles et vos vides
Les laissant ruisseler sur mes mains livides
Que je tiens vers vous depuis mon balcon
Vous croyant gentil pour une raison quelconque
Je vous fais une offrande me penchant dans la nuit
Entachée des écrans et plaisante à l’ouïe
Je m’agrippe avec force au métal de la barre
En livrant mon front pâle à vos gouttes avares
Qui, sorties des nuages cabossés et hirsutes
Cherchent à être adoptées par une âme qui transsude
À travers les rayures de chair et des os
Dans la noirceur du sol et le calme des eaux
Pour, aussi bref soit-elle, frémissant dans le cône
De la lumière pâle qui empoudre les balcons
Apparaisse un instant une frêle figure
D’un jeune homme figé dans une pose tordue
Une main accrochée tenacement au garde-corps
L’autre en l’air comme touchant légèrement à quelqu’un
Quelqu’un d’autre, très grand, très ancien et très beau
Qui séjourne là-bas, mais qui vient de là-haut
Le visage du jeune homme est tourné vers le ciel
Ses jambes sont écartées sur les carreaux mouillés
Il remue ses lèvres en disant quelque chose
Aussi drôle que sont fausses les larmes sur ses joues
Il barbote, il répète, puis se tait de nouveau
Il ramasse les gouttes, se caresse les cheveux
Son sourire frénétique frémit sur le fond
Du vitrage troublé des structures en béton
Il s’attarde juste un peu comme s’attardent parfois
Les voisins qui dépassent la limite du bonsoir
Qui se glissent dans une discussion inutile
En cherchant en vain un moyen d’en sortir
Il détache enfin, reculant de la grille
Jette encore un regard languissant sur la ville
Qui luise, ouatée d’une nappe nébuleuse
Poinçonnée par les pas et le bruit d’un vélo
Puis, toujours souriant, il retourne dans sa pièce
L’univers le regarde
L’univers
Est perplexe